Imaginez : vous êtes devant un groupe composé de vos collègues et de vos supérieurs, sur le point de faire une présentation. Comment vous sentez-vous ?
Probablement un peu craintif, transpirant et même agité. Votre cœur bat plus vite que d'habitude. Vous pouvez même ressentir une envie intense d'aller aux toilettes.
Ces sensations inconfortables vous poussent en fait à être plus performant. La bonne dose de stress vous aide à « combattre » l'expérience, en espérant que vous ne vous ridiculisez pas et que vous réussissiez votre présentation.
Dans notre passé ancestral, cette réponse au stress présentait un avantage pour la survie. En d'autres termes, elle nous aidait à rester en vie. Par exemple, en cas d'apparition importune d'un prédateur, comme par exemple, un gros mammifère.
De nos jours, les prédateurs affamés ne risquent pas d'apparaître dans nos bureaux - heureusement ! Mais les menaces perçues existent toujours et sont partout; elles prennent simplement une forme différente.
Par exemple, les discours en public, les délais, la congestion routière, les périodes d'achalandage, les collègues difficiles, les quotas, les factures et d'autres facteurs de la vie moderne.
Ces facteurs de stress modernes ne constituent pas une véritable menace pour notre vie. Par exemple, même si animer une présentation en public peut être angoissant, cela ne va pas vous faire mourir. Mais notre système nerveux est toujours programmé pour réagir comme si c'était le cas, ce qui provoque finalement une grande anxiété chez de nombreuses personnes.
Mais ce qui rend les facteurs de stress modernes si nuisibles, c'est qu'ils sont partout.
Par conséquent, si nos réactions aux facteurs de stress ne sont pas correctement gérées, notre système nerveux s'active régulièrement. Pire encore, il a rarement l'occasion de se calmer. En conséquence, le stress corporel devient chronique.
Naturellement, le fait d'être dans un état d'alerte physiologique élevé n'est pas soutenable. Au fil du temps, il épuise tous nos processus biologiques. Lentement, l'impact néfaste du stress chronique commence à se manifester. En conséquence, vous pourriez ressentir
Il serait difficile de trouver un travailleur moderne qui ne souffre pas d'au moins un de ces maux. Cette dure vérité signifie que le stress chronique n'est pas seulement un problème mais une épidémie.
De plus, les taux d'épuisement professionnel montent en flèche, ce qui sous-entend que, pour de nombreuses personnes, le lieu de travail est une source primaire de stress.
L'épuisement professionnel : un état de stress chronique
Selon l'Organisation mondiale de la santé, l'épuisement professionnel résulte d'un « stress chronique au travail qui n'est pas géré avec succès ».
L'épuisement professionnel s'exprime à la fois physiquement et mentalement. Les symptômes physiques de l'épuisement professionnel sont décrits ci-dessus. Mais surtout, l'état d’esprit et la psychologie d'un individu en prennent un coup également. Cela crée et renforce un cercle vicieux.
Par exemple, les symptômes mentaux de l'épuisement professionnel se manifestent par des pensées négatives et cyniques. Les employés sont plus irritables et se sentent plus à cran. Cette expérience provoque des sentiments de pessimisme et de détachement par rapport à leur travail.
Finalement, des sentiments d'apathie et de désespoir s'installent. Il est compréhensible que les employés qui connaissent ce niveau d'épuisement professionnel, ne soient pas en mesure de fournir une performance adéquate. De ce fait, la productivité et la qualité de leur travail en subissent les conséquences directes.
Dans un article du HRB intitulé « Beyond Burned Out », l'auteur et experte en milieu de travail Jennifer Moss parle d’une épidémie d'épuisement professionnel
Jennifer Moss affirme que l'épuisement professionnel est endémique et que les entreprises s'attaquent à ce problème sous le mauvais angle. Plus important encore, lorsqu’on intervient, il est déjà trop tard.
Moss insiste sur le fait que les interventions standard, en matière d'épuisement professionnel et de stress au travail, manquent complètement la cible.
Par exemple, de nombreuses entreprises considèrent qu’entretenir son bien-être personnel est la solution à l'épuisement professionnel - en proposant davantage de cours de yoga et d'applications de méditation. Bien que ces activités puissent être utiles pour améliorer le bien-être, elles ne sont pas un remède à l'épuisement professionnel.
« Nous avons désespérément besoin d'interventions en amont, et non de tactiques en aval », affirme-t-elle.
À titre d'exemple, si l'on considère les causes profondes de l'épuisement professionnel, celui-ci découle de normes et de problèmes néfastes au sein d’une organisation plutôt que d'être une faiblesse de l'individu.
Lorsque vous observez les causes communes de l'épuisement professionnel, il est clair qu'il n'y a pas une seule personne ou un seul groupe sur qui tient la responsabilité de la prévention de l'épuisement professionnel. Il s'agit d'un effort collectif.
Les gestionnaires, les ressources humaines, les dirigeants de l’entreprise et les employés eux-mêmes sont responsables de la création d'un environnement de travail sain et sûr. Chaque groupe joue un rôle important.
Tout d'abord, les gestionnaires jouent un rôle de protecteurs au quotidien contre l'épuisement professionnel. Ils aident les employés à gérer le stress en étant disponibles pour soutenir, en écoutant et en faisant des ajustements lorsqu'ils le peuvent. À titre d'exemple, il a été démontré que le fait d'avoir un gestionnaire empathique réduit les cas d'épuisement professionnel. Selon Gallup, les employés dont le gestionnaire est toujours prêt à écouter leurs problèmes professionnels sont 62 % moins susceptibles d'être épuisés.
D'autre part, les RH jouent également un rôle dans la prévention de l'épuisement professionnel. Leurs interventions impliquent des initiatives à l'échelle de la compagnie qui ont un impact à long terme sur une organisation, comme la mise en place d'un programme de reconnaissance ou de formations sur la santé mentale et l'épuisement professionnel pour les gestionnaires.
Explorons ces idées plus en détail et examinons quelques exemples pratiques sur la façon dont les RH et les gestionnaires peuvent collaborer pour prévenir l'épuisement professionnel des employés.
Recueillir des informations régulières par le biais de réunions individuelles : la première ligne de défense contre l'épuisement professionnel est la communication régulière avec les employés. Par exemple, demandez-leur ouvertement et honnêtement comment ça se passe au niveau de leur travail et ce qui leur cause du stress excessif. Ainsi, vous pouvez prendre en considération le retour d'information et apporter des changements là où vous avez un certain contrôle. Bien sûr, vous ne pouvez pas éliminer tout le stress de tout le monde; ce n'est pas un objectif réaliste. Mais prendre des mesures pour minimiser le stress inutile là où vous pouvez le faire, permet de réguler la réponse au stress et, en fin de compte, de limiter le risque d'épuisement professionnel.
Adapter la charge de travail et les délais en conséquence : l'un des facteurs de risque les plus importants relié à l'épuisement professionnel est une charge de travail ingérable. Par exemple, des recherches menées par Gallup ont démontré que le risque d'épuisement professionnel augmente lorsque la semaine de travail d'un employé dépasse en moyenne 50 heures. Les gestionnaires devraient donc travailler avec leurs équipes et leurs superviseurs pour trouver le juste milieu. Ces efforts contribueront grandement à maintenir le stress à un niveau gérable et à éviter l'épuisement professionnel.
Offrir un certain niveau de flexibilité : le manque d'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle est cité comme la principale raison de l'épuisement au travail, en particulier pendant la pandémie de COVID. Les femmes assument la plus grande partie des tâches ménagères et des soins aux enfants; un rapport de Mckinsey démontre que les mères sont trois fois plus susceptibles que les pères d'être responsables de la plupart des tâches ménagères et des soins aux enfants en période de pandémie. En conséquence, une mère sur trois aurait envisagé de quitter complètement le marché du travail ou de réorienter sa carrière. Par conséquent, il n'a jamais été aussi important d'offrir de la flexibilité pour assurer un équilibre sain entre le travail et la vie privée.
Traiter rapidement les conflits interpersonnels : ce n'est pas une surprise : certaines personnes sont plus difficiles à gérer. Pourtant, cela ne doit pas servir d'excuse à la persistance de conflits interpersonnels au travail. Les conflits entre les membres d'une équipe peuvent être une source importante de stress pour les employés. Les gestionnaires devraient tenter de jouer un rôle de médiateur et de résoudre tout problème le plus rapidement possible. Ces problèmes ont tendance à devenir des bombes à retardement, et une intervention précoce est vitale.
Réduire au minimum le temps passé devant l'écran et en réunion : nous avons tous entendu parler du « Zoom burnout »; vous l'avez probablement vécu vous-même. La fatigue liée au temps d'écran et aux réunions est l'une des principales plaintes des travailleurs à distance et contribue à l'épuisement. Réduire le temps d'écran ne signifie pas l’éliminer. Il s'agit plutôt d'être attentif au temps des gens. Par exemple, les gestionnaires peuvent se demander si chaque réunion est nécessaire et faire en sorte que les réunions soient aussi brèves que possible. Cela peut aussi signifier de se demander si chaque participant doit être présent.
Partager le pouvoir décisionnel : le sentiment d'un manque de contrôle sur leur travail et sur la prise de décision est une source importante de stress chez les employés et finalement d'épuisement professionnel. La solution pour contrer cette tendance est simple : créez intentionnellement un espace pour que les employés puissent exprimer leurs opinions. Demander l'avis d'un employé, c'est lui donner une voix. Les employés ont ainsi l'impression que leur jugement et leurs connaissances comptent, ce qui est inestimable pour créer un sentiment d'autonomie et réduire le risque d'épuisement professionnel.
Offrir une appréciation et une reconnaissance sincères : n'attendez pas les évaluations formelles pour dire merci. Exprimer votre gratitude à un employé est gratuit et extrêmement bénéfique. Cela est particulièrement vrai si votre expression d'appréciation est spontanée et spécifique à eux. Un membre de votre équipe s'est surpassé et a fait un travail remarquable ? Faites-lui savoir combien vous appréciez - non seulement le résultat de son travail, mais aussi les efforts qu'il a fournis.
Prendre soin de soi : ce n'est pas une surprise - les gestionnaires sont aussi mis à rude épreuve et sont eux-mêmes stressés. Lorsqu'un gestionnaire est surchargé de travail, il lui est encore plus difficile d'être disponible pour soutenir son équipe. Pour pouvoir gérer les facteurs de stress quotidiens de votre équipe, vous devez également vous assurer de gérer votre propre stress et de demander de l'aide lorsque vous en avez besoin. Et ainsi, pouvoir être là pour votre équipe lorsqu'elle a besoin de vous.
Prévention de l'épuisement professionnel chez les gestionnaires : ce n'est une surprise pour personne : un gestionnaire inefficace est souvent la principale cause d'épuisement professionnel. Selon un rapport Gallup, ce n'est cependant pas toujours la faute du gestionnaire. Ils sont eux-mêmes surchargés de travail et s'épuisent. Par conséquent, la prévention de l'épuisement professionnel des gestionnaires est une étape essentielle pour prévenir l'épuisement professionnel dans l’ensemble de l'organisation.
Formation des gestionnaires sur l'épuisement professionnel et la maladie mentale : à cette fin, il est essentiel de veiller à ce que les gestionnaires soient formés pour détecter les premiers signes d'épuisement professionnel et intervenir de manière empathique. Selon un nouveau rapport d'Oracle, 68 % des personnes préféreraient parler de stress et d'anxiété au travail avec un robot plutôt qu'avec leur gestionnaire. Ces résultats vont à l'encontre de l'intuition commune : comment un robot peut-il être plus empathique qu'un humain ? Cette étude suggère que la stigmatisation sur la santé mentale est toujours présente sur le lieu de travail et que les gestionnaires sont mal outillés pour y faire face.
Soyez transparent sur les attentes face au rôle : le manque de clarté des rôles et le manque de clarté des attentes professionnelles sont deux causes importantes d'épuisement professionnel. S'assurer que les attentes d'un rôle soient claires dès le départ est une partie importante de l'atténuation de cette cause commune d'épuisement professionnel. En pratique, cela signifie que les recruteurs et les gestionnaires du recrutement doivent être honnêtes et transparents quant aux tâches et aux responsabilités du poste et ne pas les embellir.
Programmes de bien-être : les applications de méditation et le yoga ne sont pas un remède à l'épuisement professionnel. Cependant, mettre ces ressources à la disposition du personnel sur le lieu de travail est un excellent moyen d'aider les employés à gérer leur stress quotidien. L'élaboration d'un programme de bien-être comprenant des activités physiques est une composante essentielle d’un objectif plus large de prévention de l'épuisement professionnel des employés.
Programmes de soutien en matière de santé mentale : il est devenu de plus en plus important que les employés reçoivent un soutien en matière de santé mentale au travail. Cette initiative peut prendre de nombreuses formes; par exemple, vous pouvez améliorer la couverture d'assurance maladie de votre entreprise pour y inclure des consultations psychologiques avec un professionnel. Ou encore, il peut s'agir de créer une page de ressources sur la santé mentale que pourront consulter les employés qui traversent une période difficile.
Mettre en place un programme de reconnaissance : l'appréciation est fondamentale pour l'engagement des employés et la prévention de l'épuisement professionnel. Cela dit, les programmes de reconnaissance peuvent prendre de nombreuses formes. Par exemple, un programme destiné à célébrer les années de service en soulignant les jalons importants. Il peut aussi s'agir d'un programme de reconnaissance plus moderne qui permet la reconnaissance entre pairs ou une forme plus spontanée de reconnaissance. En définitive, ces programmes aident les compagnies à reconnaître leurs employés avec plus de fréquence et de façon plus concrète.
Il convient de noter que les employés eux-mêmes sont responsables de la gestion de leur bien-être mental, par exemple en apprenant à réagir de manière plus saine aux facteurs de stress quotidiens. Cela peut impliquer l'apprentissage de techniques de relaxation et de réduction du stress pour les aider à gérer leurs réactions face à la pression au travail et aux événements stressants.
En d'autres termes, la façon dont un employé réagit à un événement stressant sera toujours sous son contrôle.
Mais un facteur sur lequel l'employeur a toujours un contrôle est la quantité de facteurs de stress présents sur le lieu de travail.
À cette fin, si un lieu de travail est fondamentalement malsain, miné par des stresseurs inutiles et dominé par des normes néfastes, même les travailleurs les plus résilients finiront par s'effondrer sous le niveau d’épuisement.